L’Abandon : Elle

Par la porte entrebâillée de notre chambre, je LE distingue à peine. Mais je sais qu’IL est là, à nous épier. Tous mes sens sont tendus à la recherche d’un signe, d’un bruit, d’une ombre. Petit à petit, ma vue s’adapte et maintenant je LE distingue nettement. IL est bien là. IL nous a suivi depuis la boite de nuit. IL a vite compris que cet inconnu me plaisait beaucoup. IL m’a bien laissé l’initiative, mais en réalité je sais qu’IL voulait tester mon amour, notre amour.
L’homme au dessus de moi, qui me couvre, a ses jambes de part et d’autre des miennes que je garde serrées. Nous sommes nus tous les deux. Dans cette position, il ne peut pas normalement me pénétrer. Pourtant son bassin ondule dans un lent mouvement de vagues. Ses fesses nues LUI prouvent qu’il est bien nu et que sa bite doit se plaquer et se frotter contre ma chatte de salope. IL doit souffrir, je le sais et ces mots crus sont les seuls qui LUI viennent spontanément à l’esprit pour parler de l’être aimé.
IL panique et s’interroge ! Se laissera-t-elle prendre ? Cette bite est-elle en elle ou bien l’homme se contente-t-il de la frotter contre son pubis ? Autant de questions qui doivent le tarauder. Je connais trop bien sa jalousie possessive. Mais là je m’en fiche. Son regard nous fixe en cet endroit. IL veut savoir.
Si je me laisse pénétrer, tout ne sera plus comme avant. Je le sais. IL le sait. J’ai la gorge serrée, mais l’homme au dessus de moi me plait. Il m’a séduite immédiatement, son corps contre le mien, au milieu de la piste de danse. Depuis le bar, IL nous surveillait, mais cela ne m’a pas arrêtée. C’est même moi qui lui ai proposé de venir à la maison.
J’ai passé mes bras autour de son cou. Il a sa tête contre mon épaule, pour autant, je résiste et ne me laisse pas embrasser. J’ai peur. Il tente bien de m’attr les lèvres mais à chaque fois je finis par une esquive. En revanche, je lui offre la chair chaude et douce de mon cou. Je sais que LUI aussi aimait venir se caler en cet endroit quand nous faisions l’amour.

Mes cheveux noirs éclatés sur l’oreiller forment une couronne à mon visage qui affiche sérénité et bonheur. Je me sens bien, belle et resplendissante dans cette pénombre.
L’homme a glissé une main entre nos corps et me caresse le sein. Son autre main, de l’autre côté, me caresse le sexe. Je panique ! En fait, je réalise qu’il doit plutôt tenter de conduire sa queue entre mes lèvres humides.
Je le sens qui relève légèrement le bassin. Dans cette situation son gland est à l’entrée de ma grotte d’amour. Il garde la pose. Illusion ? Je me mens pour ne pas voir la réalité : il cherche à me pénétrer. Non, je ne veux pas et je resserre encore plus mes jambes. Je me refuse. Le corps de l’homme s’effondre sur le mien dessous, fatigué. Il recommence ses ondulations pour frotter sa bite contre mon sexe offert, que je devine chaud comme la braise. Son autre main me caresse toujours et un léger mouvement de son épaule doit LUI montrer qu’elle s’active contre et même dedans ma vulve qu’IL devine chaude et humide. Comme IL la connait, quand je L’aimais…
L’homme abandonne un instant le sein. Sa main se saisit de l’interrupteur de la lampe de chevet près de lui. Sa lampe de chevet ! Celle qui est du côté de notre lit qu’IL occupe habituellement. Car nous sommes dans le lit conjugal, qui a été notre lit nuptial quand pour la première fois je me suis offerte à LUI, jeune épouse, la nuit de nos noces.
Je garde les yeux fermés, mes gémissements accompagnent une respiration courte. Je prend du plaisir c’est sûr, et l’envie de me livrer se fait plus intense.
Alors je prends dans mes deux mains le visage de mon amant, l’écarte et plante mon regard dans le sien, au dessus de moi. Ses yeux brillent à la lumière de la lampe de chevet. Mes lèvres sont entrouvertes habitées d’un léger tremblement. L’expression affichée sur mon visage ne doit pas LUI échapper et doit LUI faire l’effet d’un coup de poing au ventre. IL connait bien cette expression. IL ne la croyait que pour lui ! C’est l’expression de la femme amoureuse.

Mes yeux progressivement se couvrent de larmes et déjà certaines s‘écoulent sur les joues rouges de mon visage crispé maintenant. Par deux fois j’incline à gauche puis à droite la tête en signe de refus. Je veux lui dire « non », le supplier d’arrêter. Mais pour autant, je reste collée à lui et IL peut lire dans ce regard, un sentiment confus qu’IL reconnaît bien pour l’avoir si souvent intercepté, avant, quand on s’aimait. Regard amoureux qui doit LUI glacer le sang. Mes lèvres ne sont plus qu’à quelques millimètres de celles de mon amant. Je les maintiens encore à distance, et je résiste à la tentation de les lui abandonner. Je sens son souffle chaud chargé de désir. LUI ne voit pas le visage de cet homme qui continue inlassablement à se frotter contre mon corps allongé sous lui.
Je sais, sans le besoin de le voir, qu’IL reste immobile, voyeur impuissant, qui regarde sa femme le quitter lentement, sans rien tenter pour la garder. J’ai le sentiment qu'IL me voit mourir lentement dans son cœur ! Je connais bien, IL doit avoir envie de pleurer tellement IL a mal, tellement IL souffre. Et moi, je me laisse partir, le cœur plein d’allégresse, alors que les remords s’estompent.
A nouveau les fesses du mâle sur moi se lèvent, puissantes, son bras se glisse plus loin entre nos corps. La main a abandonné le sein pour se glisser derrière, sur mes reins, plus bas encore, juste au dessus de mes fesses, comme pour mieux me maîtriser, mieux me coller à lui. Il tente ainsi de vaincre la résistance de mes deux jambes serrées qui lui interdisent, encore pour quelques instants, l’entrée du sexe féminin. Il me tire à lui, me fait me cambrer. Il sait ce salaud que de cette manière, mon sexe s’avance et s’ouvre au devant de sa bite. Je grimace. A nouveau je remue la tête pour signifier mon refus. Je le regarde pourtant toujours droit dans les yeux mais son regard dit le contraire. Je panique ! L’AUTRE, derrière la porte doit s’imaginer que peut-être je vais me refuser.
Mais je sais que c’est trop tard.
Mes larmes sont devenues plus abondantes, mais je me retiens d’éclater en sanglots. Les fesses lentement, inexorablement, s’abaissent. Le gland, décalotté, entre en contact avec mes lèvres. Celles-ci ne souhaitent que le recevoir, le laisser pénétrer ma vulve qui attend. Mes muqueuses rosies de désir prennent la mesure de ce contact. Elles enregistrent à jamais la forme, le doux toucher, la chaleur de cette boule de feu. Le temps suspend son avancée. LUI, comme pétrifié, doit mater ce moment assassin.
Une goutte de liquide séminal sourd au bout du gland et vient se mêler à mes lymphes de femelle et ce mélange, comme la sève d’un arbre, va remonter dans mon vagin, imbibant mes muqueuses rougies de sang à en exploser. La liqueur fécondante afflue dans les organes de réserves de l’homme, prêtes à se déverser et déclencher bientôt la ponte de l’ovule qui signifie la vie à perpétuité des deux êtres qui s’accouplent. IL m’a déjà dit tout cela, et là je comprends le sens de ses mots.
Nos muqueuses sont excitées par des milliers de terminaisons nerveuses qui adressent aux deux corps des milliers de signaux de plaisir. Des frissons parcourent ma peau, ondulants comme des vagues qui, sans cesse, caressent les plages.
Nous sommes seuls, seuls à vivre cet instant magique où l’homme possède la femme qui se donne dans cette étreinte divine ou diabolique.
Soudain mon visage se crispe, je ferme les yeux alors que je réalise que les fesses de l’homme présentent l’orientation idéale à l’introduction.
Le cul masculin reste immobile un instant, en suspend au dessus de sa proie. Je retiens mon souffle. Veut-il mon accord ? Non, sûrement pas. C’est un baiseur prédateur, il recherche son seul plaisir, ignorant l’existence même de sa victime. C’est le coït pour le coït. IL le sait aussi, qui mate sa femme en train de se faire baiser.
Brutalement, d’un coup, les fesses s’abattent sur moi, figées dans cette orientation qui ne doit plus LUI laisser aucun doute sur la pénétration.
IL regarde la queue qui s’enfonce d’un coup en moi envahissant entièrement mon vagin lubrifié. A cet instant je ne peux retenir un petit cri et j’ouvre grand les yeux. Ma bouche cherche de l’air. Je veux LUI dire « pourquoi ? Pourquoi TU m’as laissée partir », mais bien vite, progressivement, je laisse échapper ces petits gémissements qui accompagnent la soumission totale à mon amant. Et l’irréparable s’accomplit, véritable profanation du lieu sacré pour LUI, par l’introduction de cette bite étrangère et diabolique dans mon vagin.
IL ne voit rien, mais les corps enlacés LUI montrent encore plus, alimentés par son imagination. Son monde s’effondre. IL m’a perdue en cet instant si bref, si banal, d’un sexe qui en pénètre un autre. Ce n’est pas LUI qui me fait l’amour.
Maintenant l’amant a entrepris ses va et viens entre mes cuisses qui lentement s’ouvrent, vaincues. Je m’apprête à jouir, IL le sait bien, LUI qui m’a fait jouir si souvent.
Nos bouches sont soudées et nos langues se mêlent dans un baiser sans fin. Doucement je lève mes jambes et entourent les reins de l’homme qui me besogne, pour mieux le sentir en moi et mieux lui signifier mon abandon. Ses mains ont quitté mon ventre pour reprendre possession de ma poitrine brillante de sueur. Cette poitrine à la peau si douce, aux tétons si beaux et vivants, réagissant au moindre frôlement, au moindre souffle. Très vite, trop vite, le rythme des mouvements des corps s’accélère, nos bouches se séparent à la recherche d’un peu d’air et ensemble on explose dans un orgasme bruyant alors qu’il se vide en moi, nos corps tendus, empreints d’une extase extrême. Un instant qui existe sans LUI.
Puis lentement j’imagine qu’IL n’arrive pas à détacher son regard du couple qui vient de s’unir devant lui. Sa femme vient de se donner à un autre. Et sans protection ! Acte abominable s’il en est ! Avec toutes les conséquences que cela implique. Ses paroles me reviennent, mais trop tard ! Je me sens incapable de bouger. Nous restons collés l’un à l’autre, lui toujours planté en moi, pour contenir sa semence au fond de mon vagin, tout près des organes de procréation. Je réalise que j’ai gardé mes jambes serrées autour de ses hanches pour le retenir. Je lui caresse la nuque, dans un geste de douceur affective. Il me passe la main dans les cheveux.
Nos deux corps, repus, restent encore enlacés, intimement liés par le contact de notre peau, alors que lentement la liqueur déposée au fond du vagin m’envahit, gagne toutes mes cellules vivantes jusqu’à mon âme. Je comprends la force de ce symbole, celui de la possession et de l’abandon. Je me fonds en lui, il me symbiose, me phagocytose. Au delà même du physique c’est l’esprit qui change de corps. IL me l’a si souvent dit.
Les minutes passent puis lentement, mon amant éphémère s’écarte pour venir s’allonger à mes côtés. Ma poitrine nue est habitée de soubresauts, ma respiration saccadée. Je ne pleure plus pourtant et c’est même un sourire plein de tendresse que je lui adresse. Le plaisir sexuel passé, c’est un sentiment d’amour que je veux lui témoigner.
Toujours caché, IL doit se demander si je mesure l’étendue du désastre. Si je réalise ce que je viens de faire ? Est-IL encore au centre de mes pensées ? Ou bien est-ce que je crains déjà de perdre celui qui vient de me donner tant de plaisir ? Mon amant, cet homme qui m’a séduite en une seule soirée. Cet homme à qui je n’ai pas résisté plus de quelques minutes avant de lui abandonner, pour l’effacer, tout le passé qui est le notre. C’est vrai que je me suis laissée aller à ma propre jouissance et docilement je me suis résolue à prendre le risque de me faire féconder par la virilité puissante de cet amant de passage. Je LE sais détruit, mais c’est bien LUI qui m’a autorisé les initiatives dans cette salle de bal.
Un homme a pris possession de sa femme, déversant en elle sa semence. Ce symbole est extrêmement fort. Même s’il ne m’a pas fécondée, il m’a ensemencée. Le sperme, le germe qui est maintenant en moi, va coloniser toutes les cellules de mon corps, jusqu’à mon cœur, mon esprit, mon âme. Plus jamais je ne pourrai m’en délivrer, effacer ce « marquage » indélébile. Je resterai marquée jusqu’à la fin de ma vie.
La pénétration est le premier stade de cette invasion. Quand le gland écarte les lèvres humides, ultime barrage à l’invasion, pénètre et avance, conquérant, dans la place forte, plus rien ne peut plus s’opposer à l’accomplissement de la catharsis.
Dans le silence de cette chambre, je perçois des sanglots. SES sanglots. Et alors toutes ces questions et pensées me submergent. Est-ce un coup de foudre si brutal ? Un moment d’égarement, vite oublié ? Le début d’une liaison adultérine ? En cet instant je ne sais plus si je L’aime encore. Et même s’IL m’aime encore. Et c’est à mon tour de fondre en larme quand j’entends le moteur de son auto s’éloigner pour fuir cet endroit, pour LUI sans doute de malheur, qui est ou a été notre maison.
Je ne suis pas heureuse, non !
Je suis seule, sans époux, le cœur vide.

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